Poilu écrivant dans une tranchée.
Le 11 novembre 2017, la classe des CM a rendu hommage aux soldats de la Première Guerre mondiale.
Nous avons découvert et étudié des lettres écrites il y a cent ans, en 1917, par les Poilus. Ils en avaient assez de combattre. La guerre était infernale, horrible : les hommes dormaient dans les tranchées qui étaient envahies par les rats, par la boue. Ils ne pouvaient pas se laver. Ils avaient froid, ils avaient peur des gaz moutarde, peur des obus et des canons, peur de voir surgir les Allemands à tout moment.
Les Poilus écrivaient des lettres pour leurs familles. Mais la censure veillait et les lettres étaient triées par le Contrôle postal. Dès qu’une lettre était un peu pessimiste, elle était détruite ou archivée.
Ce sont ces lettres que nous avons lues.
Nous avons également lu des extraits de textes d’écrivains français et allemands et de poètes anglais. Éline a lu la lettre qu’un commandant a écrite à son arrière grand-mère pour dire que son arrière grand-père avait fait quelque chose de brave.
Nous avons aussi choisi des photographies qui illustraient les combats, les conditions de vie au front, les forêts détruites avec les arbres brûlés, les chevaux morts, le Chemin des Dames où il y a eu beaucoup de morts. Certains élèves ont dessiné des fresques représentant les Allemands et les Français. Nous avons aussi préparé des cartons pour représenter le Contrôle Postal.
Nous nous sommes entraînés à lire à haute voix. Comme deux élèves n’étaient pas là le 11 novembre 2017, elles ont procédé à un enregistrement avec l’aide de Gwenaëlle.
Puis nous avons répété le spectacle en créant une petite mise en scène : nous nous sommes placés par terre comme les soldats ; d’autres élèves jouaient le rôle des membres du Contrôle Postal. Enfin, des élèves étaient chargés de projeter des photographies différentes pour illustrer nos lectures.
Sur scène, nous avons eu le trac ; nous étions stressés lorsque nous sommes passés au micro. C’est bizarre d’entendre sa voix dans le micro.
Ces lettres nous ont appris que la guerre était cruelle, totale et longue. Il y a eu plus de dix millions de morts.
Le public a aimé notre petit spectacle : il y avait André de Lire et Faire Lire, nos familles, le maire, Christiane Nys, les maîtresses et beaucoup d’autres personnes.
Texte composé à partir des écrits produits par l’ensemble des élèves de la classe de CM1-CM2 :
Ava, Blanel, Clément, Djenna, Éline, Émilie, Fabio, Gabrielle, Inès, Joyce, Kevin, Luna, Mathilde, Maxence, Melchior, Mélissa, Nathan, Noémie, Olivia, Sammy, Sarah, Shany, Théa, Valentine.
Les raisons de quelques choix de textes par les élèves
« J’ai choisi de lire un extrait de lettre d’un soldat qui s’appelait René : elle m’a émue parce qu’il disait qu’il en avait assez de la guerre, il voulait qu’elle s’arrête. Et aussi, il voulait revoir sa femme et son enfant qu’il n’avait vu que deux fois depuis qu’il était né. » « J’ai choisi de lire un extrait d’une lettre d’Albert Cazes parce qu’il parlait de son ami qui avait été pulvérisé par un obus. » « J’ai choisi une lettre parce qu’elle est triste et elle raconte la vraie vie des soldats. » « J’ai choisi de lire une lettre qui parlait d’une pauvre haridelle partie à la guerre parce que j’aime les animaux. » « J’ai choisi de lire une lettre qui parlait de la censure et du contrôle postal.»
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Aux armées, le 20 septembre 1917 Cher ami, Il y a une demi-heure à peine, je viens d’apprendre la mort d’un pauvre jeune homme de ma compagnie pulvérisé par un obus dans un coin de boyau où hier soir encore, j’étais passé avec lui. Jour et nuit, c’est un déluge de fer et d’acier qui s’abat sur nous. C’est à rendre imbécile, c’est laid, c’est odieux, nous nous terrons (quand nous le pouvons) comme des bêtes traquées et les jours succèdent aux jours, tristement, dans la crasse, les poux et la puanteur. Je vous assure que quelques mois de ce dur métier sont plus que suffisants pour abrutir un homme. Comment n’ai-je pas été tué cent fois ? Je n’en sais rien. Il n’y a pas d’eau. On ne peut ni se laver ni changer de linge, ni sortir à découvert pour satisfaire le moindre besoin. Je ne rougis pas de déclarer que j’en ai assez. Je ne peux pas, je ne peux pas en supporter davantage.
Albert Cazes
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Cinquante mois on se l’est disputé, on s’y est égorgé et le monde anxieux attendait de savoir si le petit sentier était enfin franchi. Ce n’était que cela, ce chemin légendaire : on le passe d’une enjambée… Si l’on y creusait, de la Malmaison à Craonne, une fosse commune, il la faudrait deux fois plus large pour contenir tous les morts qu’il a coûtés. Ils sont là, trois cents mille, Allemands et Français, leurs bataillons mêlés dans une suprême étreinte qu’on ne dénouera plus, trois cent mille sur qui des mamans s’étaient penchés quand ils étaient petits, trois cent mille dont de jeunes mains caressèrent le visage. Trois cent mille morts, cela fait combien de larmes ?
Roland Dorgelès, Le réveil des morts, 1923
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Je n’ai encore jamais entendu crier des chevaux et je puis à peine le croire. C’est toute la détresse du monde. C’est la créature martyrisée, c’est une douleur sauvage et terrible qui gémit ainsi.
Erich Maria REMARQUE, A l’ouest rien de nouveau, 1929
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I will show you fear in a handful of dust. (Je te montrerai la peur dans une poignée de poussière.) Thomas. S. Eliot, The Waste Land, 1922
Cratères d’obus au Chemin des Dames en 1917. Crédit : Great War Observer / FlickR.